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Plastico: un documentaire et un film musical.

13 juin 2014

50 degrés nord!

Quart d'heure warholien pour "Plastico" vers la 24e minute. ;-) Merci à l'équipe de 50 degrés nord!

 

http://www.rtbf.be/video/detail_cinquante-degres-nord?id=1934900

 

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3 juin 2014

Projection publique à Bruxelles

Finalement, il y aura quand même une projection publique (et gratuite!) de Plastico à Bruxelles, organisée par la Sacd-Scam, le 16 juin à 20h. Elle sera précédée d'un petit concert solo de Veronika Harcsa!

RESERVATION INDISPENSABLE AVANT LE 13/6 (voir ci-dessous)

 

arrow ACTION CULTURELLE SCAM

 

INVITATION: PROJECTION DEPLASTICO, D'YVES CANTRAINE

 

arrow LE 16/06 AU CINÉMA AVENTURE

 
news_image
 

 

Alok Nandi, Président, et les membres du Comité belge de la Scam vous invitent lelundi 16 juin à 20h au Cinéma Aventure, à la projection de Plastico, un documentaire d'Yves Cantraine.

 

Plastico, d'Yves Cantraine

Un monde qui se plastifie. Les terres de Nijar, en Andalousie, ont vécu en une génération le passage brutal d’un monde encore largement prémoderne au consumérisme. Le paysage se couvre de serres de plastique et devient le lieu d’un désastre environnemental, mais aussi d’un choc culturel brutal : celui de l’oubli et de la plastification des âmes. La mémoire sacrifiée sur l’autel de la productivité.
Le film, à la fois documentaire et poème chanté, oratorio filmé, s’élève contre cet oubli en évoquant la toile de la mémoire, et en interrogeant ses propres images. La jeune star hongroise Veronika Harcsa et le brillant violoncelliste Albert Markos, filmés et enregistrés in situ, prêtent leur talent singulier à ce projet.

Documentaire - 70 min - 2013 - Production: Les Mots Bleus. Coproduction: Hélicotronc - Centre de Promotion Culturelle. Avec l'aide du CVB.

Pour en savoir plus, veuillez trouver la bande annonce du film, une critique sur le site Cinergie, et la biographie de l'auteur.

 

Informations pratiques

Lieu :  Cinéma l'Aventure (galerie du Centre, rue des Fripiers 57, 1000 Bruxelles)
Date : le lundi 16 juin à 20h
Entrée libre mais réservation indispensable avant le 13 juin.
La soirée se poursuivra par un drink.

Réservation et informations : Action culturelle - actionculturelle@sacd-scam.be

Les Rencontres de la Maison des Auteurs visent à promouvoir la diversité des écritures et des regards des auteurs. Nous vous proposons des rencontres avec des œuvres qui sont autant de points de vue sur le monde.

 

8 mai 2014

Veronika Harcsa en concert à l'Institut Balassi à Bruxelles, vendredi 9 mai.

En attendant, une de ses dernières créations filmée au Conservatoire royal de Bruxelles... Just click...

 

 

https://vimeo.com/94516155

30 avril 2014

Quelques beaux retours.

RDP: "Merci pour ton film, dont nous avons aimé la tonalité méditative et nostalgique, la temporalité, et la liberté qui est laissée au spectateur de faire son chemin dans ce que tu montres, sans imposer trop de lecture ou de vision." ... "Plastico est une sorte d’éloge (grave) de la simplicité. Il est du côté des images sauvées du néant, des images qui acceptent d’être pauvres au sens noble du terme."

FL: "Quel amour des gens et de la région ! On sent bien la perte d'identité, l'histoire de la région, les questions qui nous taraudent tous: quel avenir voulons-nous ou avons nous voulu ou du moins accepté."

BC: "What a relief to have time to digest the images and really listen."

JP: "Tu es peut-être plus dans les arts plastiques que dans le cinéma... ça parle moins de tomates que du regard sur les tomates."

Et merci à Cinergie pour ce très beau texte de Fred Arends: ttp://www.cinergie.be/webzine/plastico_de_yves_cantraine

 

Le trailer est visible ici: https://vimeo.com/74464214

 

 

19 mars 2014

Les chants (in extenso).

partition03

1.

Au commencement étaient le ciel et le vent, le soleil et le feu.

Au commencement, la mer et les ruisseaux.

Au commencement était la terre.

Et quand la terre eut proféré, la terre se reposa.

La terre s’endormit. La terre s’oublia.

Mer, vent, feu, poussière.

La terre naissait du feu, le feu naissait de l’air,

L’air naissait de l’eau, l’eau sourdait de terre.

Mer, vent, feu et poussière en un cercle infini...

La terre alors se reposa, la terre alors s’endormit.

Alors la terre oublia quelques lézards assoupis sous la braise de ses pierres.

Et les lézards s’endormirent.

Et ils se réveillèrent.

Les lézards peuplèrent la terre.

La terre se couvrit de noms, la terre se fit leur livre ouvert.

La terre revêtit leurs écailles d’argent.

Sur la terre, ils se penchèrent, le regard triomphant.

Mais ce qu’ils virent les désola.

Ils ne virent plus la terre. La terre ils ne virent.

De la terre ils ne virent que leur propre reflet,

Une image séchée :

Leur corps sans vie et leur face blafarde, leur visage momifié.

Bienvenue, bienvenue,

Bienvenue dans le désert européen.

 

2.

Ici pas de bosquet sacré ni de ruisseau rieur :

Seuls le mouvement des plaques et l’horloge du monde,

L’horloge aveugle et le mouvement des plaques.

Ici pas de bosquet sacré ni de ruisseau rieur.

Seuls le mouvement des plaques et l’essence du monde :

Les quatre éléments sans aucune afféterie.

L’homme est assemblage de ces quatre éléments,

Les uns sont du ciel, les autres de la terre.

Quand il trouve xsa fin, se défait l’assemblage :

Certains fluides à la xterre xreviennent quand d’autres montent au ciel.

Le jaune vire au vert et le vert devient bleu et le bleu sera rouge.

Certains fluides au ciel quand d’autres à la terre.

Et rien ne s’arrêtait… Non, rien ne s’arrêtait…

 

3.

Terre brune rouge rouille, terre de fer, terre de flammes et de grenats,

Grenats du cœur de la terre : caillaux de sang d’un ventre incandescent.

Brun rouge rouille orange : ici se mêlèrent la lave et le sang.

Vert bouteille et vert de l’eau. Mines de cuivre mines de vert. Vert du cuivre et de la mer.

Blond des pailles et des citrons. Fauves, ocres et safrans.

Terre jaune sous le soleil. Or des spartes ondoyants. Mines d’or, mines d’or.

Bleu cobalt et bleu du vent. Azur les yeux outre la mer.

Bleu vert jaune et rouge :

Cuivre fer manganèse et cobalt.

Couleurs de la durée et d’un monde sans fin...

 

4.

Ceci est l’Europe ! Ceci est l’Afrique ! L’Afrique en Europe !

De la géologie,

La volcanologie,

La minéralogie,

De la géochimie,

La métallogénie,

Les généalogies,

Nous savons que ceci,

Que ceci est l’Afrique.

La plaque tectonique.

Non non ceci est l’Europe ! Tout ceci est la terre de nos rois catholiques !

Los Reyes los Reyes los Reyes Catolicos! Reyes! Reyes!

Almeria Alcazaba Alhabia Almanzora Los Medinas

Ceci est l’Europe lorsqu’elle naquit du sang,

Rouge ! Dans l’extermination ! Rouge ! Dans l’expulsion.

Extermination : première ! première extermination !

Ne doit rester que nous, que les autres disparaissent

Ne doit rester que nous, que les autres disparaissent

Extermination ! Première ! Take one ! Take one !

 

5.

Le passé oublié, nul ne peut plus parler.

On ne creuse plus rien.

Les années de famine !

De famine ? Quelle famine ? De famine il n’y eut.

Les années momifiées dans l’église assemblées,

Les années momifiées sous un même uniforme !

Des années momifiées ? Quelles années ? Des années il n’y eut.

Cette terre ne pouvait rester vierge, elle devait être prise

Par l’église et l’armée tout fut bien ordonné.

Les terres mises en champs, des villages édifiés.

Vinrent les coffres d’acier, les chiffres des banquiers,

Une chape d’argent trop vite accumulé

Le passé oublié nul ne peut plus parler.

On ne creuse plus rien. On ne creuse plus rien.

 

6.

Il fallait renommer, repeupler, contrôler, oublier, arrimer, recouvrir et bâtir,

Et les Rois imposèrent leur foi sur cette terre inhospitalière.

Et les rois sur cette terre imposèrent leur foi inhospitalière.

Renommer, repeupler, contrôler, oublier, arrimer, recouvrir et bâtir

Strates sur strates, couches sur couches.

Le plastique est écaille, le plastique est miroir :

De la terre ne reste que notre propre image.

Regardez ce village altéré ! Ce visage fardé !

Ce village d’images et de cartes postales !

Le passé mutilé, nul ne peut plus parler.

Destin, est-ce donc celà ? Est-ce là ce qui nous attend ?

Est-ce le grand effort des Rois catholiques ? Reyes catolicos ? Catolicos ?

 

7.

Ethylène

Propylène

Rois catholiques : rois des images.

Un monde d’images à notre propre image.

Ne doit rester que nous, que les autres disparaissent !

Take one ! take one !

Et nos villages blancs ne seront plus qu’images.

Ici même, jamais, n’arrivera plus rien et rien jamais n’est arrivé.



Un village en images, un village sans vie.

For rent, for sale, pour une poignée de dollars.

For rent, for sale, pour quelques dollars de plus.

Mais que sont les images? Mais que sont ces images?

Saints suaires modernes de ce lieu sacrifié?

Me voilà donc complice du règne et ses spectacles?

Ou espérance du beau, de la résurrection?

We speak English Deutsch olandes y frances

For rent for sale

 

8.

Regarde, regarde, voici la mémoire du lieu :

Cet enclos comme une île dans des vagues gelées.

Juan Paco Mari Sara Nacho José Julian Elé

De vos mains et vos pieds le recueil obstiné.

Le cimetière est plus vif que nous, enfants châtiés !

Nous paierons par le vide les excès de nos pères...



Sous mille et uns visages le vide s’est caché :

Une chape d’argent trop vite accumulé.

Visages hébétés par mille et un objets.

C’est ici que se fait l’opulence du lieu.

C’est ici que se fait la douleur du monde.

Ici nous fabriquons ici nous fabriquons

Ici nous fabriquons le futur du monde.

For rent for sale we speak

For rent we speak

We speak for rent we speak...

Et les lézards rampent

Ils rampent et rampent et rampent

Il n’y a plus de saison, madame.

Oh ! divine tomate ! Si tu n’es pas assez belle, je ne te mangerai pas, ne t’achèterai pas.

J’ai les yeux dans la bouche. J’ai les yeux dans la bouche.

 

9.

Quand la langue se vide, la terre est terrain vague.

Signaux ou enseignes : plastiques rutilants, écailles d’argent, miroirs aveuglants.

Mer sans couleur, de plastique océan.

Faire de ce désert vivant un hospice cuivré

Un hospice bronzé, un hospice blafard.

Que le Nord se gave de ce Sud embaumé

 

10.

Pepa prit l’un des pots et se mit à jouer !

Elle le fit tourner, le refit tourner !

Elle le fit tourner et tournoyer plus vite !

Le temps se mit à rire en une vrille hurlante !

Et des couleurs vives ne resta que le blanc,

Des linceuls le blanc et du deuil le blanc.

Pepa mit ses rollers et parcourut l’espace !

D’une chose consommée le double apparaissait !

Jamais un seul rayon le vide n’exhibait !

Le vide surgissait ? Pepa le saturait !

Le vide se masquait.

Le temps s’accélérait. Le temps disparaissait.

Ici même, jamais, il n’arrivera rien et rien jamais n’est arrivé.

Faut-il donc oublier ?

Erase and erase and erase and erase

Mais que sont ces images ? Saints Suaires modernes de ce lieu sacrifié ?

Me voilà donc complice du Règne et ses spectacles ?

Ou espérance du beau et de la survivance ?

Sous mille et un visages le vide se cache-t-il ?

Visages hébétés par mille et un objets...

Visages hébétés par mille...

Visages hébétés...

Visages...

Blêmes... blanc... blanc... blanc...

Esprit, es-tu là ?

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13 mars 2014

It's out!

Voilà! Le dvd de Plastico existe. Pour ne plus prendre trop de risque, il est mis en vente au prix de 19 euros. Je peux vous l'apporter, vous l'envoyer, ou vous passez me voir! :-)


There you go! Plastico's dvd has just been released. Its price is 19 euros (in order not to take more financial risks...), including postal delivery.

Virement / transfer:

Les Mots Bleus

82 rue Van Aa

1050 Ixelles

IBAN BE47 0003 2537 5180

Code BIC: BPOTBEB1

 

jaquette Plastico ok S

4 mars 2014

Très bientôt le dvd, enfin...

jaquette Plastico ok copy

 

Les couleurs ne sont pas très respectées, mais voici pour vous donner une idée de l'objet... Sortie le 15/3?

21 janvier 2014

Festival and dvd

En avril, "Plastico" inaugurera la tournée des festivals au Festival International de Ciné de Montevideo, Uruguay. Espérons que la tournée sera longue!

Mais le dvd du film sera probablement mis en vente dès février, probablement au prix de 25 euros (envoi compris)... au cas où vous seriez intéressés...

 

In April, "Plastico" will start a world tour in the Montevideo International Film Festival, Uruguay. Hopefully it will be a long long tour...

Before, the DVD will probably be available in February. Its price will (also probably) be 25 euros. More information here in Februrary.

28 novembre 2013

Fiche technique et remerciements.

Générique:

Composition musicale: Veronika Harcsa et Albert Markos

Chant: Veronika Harcsa

Violoncelle: Albert Markos

Prise de son musicale et sons additionnels: Ricardo castro

Images d'archives: Philippe Dupiereux

Assistant, prise de son, régie, traduction, corrections digitales et effets spéciaux: Joaquin Embi

Montage son et mixage: Loïc Villiot

Studio de mixage: CVB

Etalonnage: Miléna Trivier - CPC

Comptabilité: Etienne Tilmans

Je vous remercie chaleureusement pour votre gentillesse et votre talent!

 

Remerciements:

Hughes Becquart, Chantal et Christian Lenoir-Cantraine, Mounira Baccar et Philippe Cantraine, Brian Collins, Renaud De Putter, Dominique Emsens, Greta Raemdonck, Juliane Regler, Michèle et Guy Stiévenard-Cantraine.

Ainsi que Belén Ausejo, Cyril Bibas, Nacho Carranza, Dino Chatila, Valérie de Changy, David del Aguila, Julien Demoulin, Fransi de Villar Dille, Renelde Dupont, Julie Esparbes, Annick Ghijzelings, Guy-Marc Hinant, Eva Houdova, Alejandro Marcos, Juan Martinez, Ariane Mellet, Serge Meurant, Oranne Mounition, Marianne Pousseur, Anthony Rey, Felipe Sandoval, Charon Saudemont, Michel Steyaert, Caroline Strubbe, Geneviève Van Cauwenberge, Laura Wandel.

Merci beaucoup à vous toutes et tous pour votre soutien!

 

Fiche technique:

Durée: 70' / Couleurs

Support: DVD et Blu Ray

Sous-titres: français et anglais

 

26 novembre 2013

Pas de première en salle

Lors d'une projection technique de Plastico dans un cinéma bruxellois, j'ai été choqué par la qualité des images après les avoir toujours vues pendant le travail sur écrans d'ordinateurs, télévisions et moniteurs. De mes belles images HD, je n'ai vu que des "images vidéos" sur grand écran. Disparu, ce qui me semblait de la haute-définition: rien à voir avec ce que nos yeux découvrent aujourd'hui au cinéma. Pour atteindre la qualité technique à laquelle ils sont habitués, il aurait fallu des moyens encore plus sophistiqués.

C'était un peu triste...

En outre, je ne suis plus assez sûr de moi, plus assez fort pour faire face à la projection en public d'un film qui tente de se sauver du désespoir en pariant justement sur la beauté des images et de la bande sonore. Redemption by form, disent les anglophones. 

J'ai réfléchi... Et je me suis dit qu'il valait mieux vous permettre de voir le film en ligne ou en DVD, et d'ainsi rencontrer mes "belles images" plutôt que gaspiller encore de l'argent en louant une salle, aussi bien équipée soit-elle.

Donc, il n'y aura pas de première de "Plastico" le 20/12... sauf chez vous!

Je remercierai donc ici tous ceux qui m'ont permis de faire ce film de quelque manière que ce soit! Mes mécènes recevront un DVD ou un Blue Ray dès que possible.

21 novembre 2013

Notes éparses

Je ne vois qu’une chose : que bientôt va mourir / l’idée de l’homme qui apparaît dans les glorieux matins » (Pasolini, « Poésie en forme de rose », extrait du recueil Poésies 1953-1964). ... Sauf si le corps de l'homme se remet à chanter?

 

La mélancolie trahit le monde pour l’amour du savoir. Mais en s’abîmant sans relâche dans sa méditation, elle recueille les objets morts dans sa contemplation pour les sauver. (Walter Benjamin, "Origine du drame baroque allemand", 1928)

 

Un des plus beaux moments de la post-production: lorsque Loïc, spontanément, immédiatement, tourne ses boutons lorsque je lui dis: "Il faut faire entendre le silence de dieu."

 

De la parataxe, du fragmentaire, de l'illusion de continuité (un road-movie qui ne mène qu'à la nuit?): suis-je dans ça?

L’irrégularité, le « faux », le choc, le saccadé viennent contester l’apparence, la totalité et la domination de la convention. Ce que l’atonalité de Schönberg disloque c’est l’idée d’une organisation rationnelle du processus de production artistique définie comme progressive et totale. Elle dénonce la fausse conscience restauratrice (et barbare) d’un ordre de la consonance. La dissonance ne vient pas seulement interroger l’obéissance historique à un modèle idéologique et à une technique musicale. La dissonance est plus essentiellement un rapport dialectique avec la société...

Face à l’idéalisme tonal, Schönberg libère le matériau en créant de nouveaux rapports qui sont autant d’enjeux pour la société et la philosophie. En effet, si la dissonance est la destruction des rapports logiques à l’intérieur de la tonalité – comprise comme rapports d’accords parfaits – il y a une rationalité de la dissonance qui met en relief les articulations au lieu de dissoudre les détails dans l’unité. En ce sens, la constellation – entendue comme éclatement et dispersion contrariant toute souveraineté de l’identité de la forme – et la fragmentation sont les enjeux d’un contenu de vérité de l’œuvre comme forme négative et critique : "C’est seulement dans l’œuvre fragmentaire, renonçant à elle-même, que se libère son contenu critique." ...

Le négatif adornien, c’est le refus de l’immédiateté des choses, la mise en contradiction des représentations habituelles. C’est la contestation du toujours-semblable pour rendre possible un contenu de vérité. Toute forme d’harmonie réalisée est désormais impossible, tant sur le plan philosophique qu’esthétique. Cela tient même du mensonge. (Sébastien Rongier, à propos de Adorno et sa Philosophie de la nouvelle Musique)

 

Pourquoi faire oeuvre de beauté dans des sombres temps où existe une classe qui possède la beauté? (George Didi-Huberman, à propos du film La Rabbia de Pasolini.)

 

Un "essai cinématographique":

Adorno conçoit l’essai comme le médium spécifique d’une « déviation par rapport à la norme » et, de ce fait, comme la seule possibilité effective de forcer linguistiquement et stylistiquement le « dispositif d’aveuglement » de l’idéologie. (Christian Schärff, à propos de Benjamin et Adorno:  http://traces.revues.org/328)

1 novembre 2013

Un film impropre à la consommation?

  • Voici le copier-coller depuis Facebook d'un dialogue spontané autour du film, une rencontre avec Anne Roder, poète qui a aussi beaucoup dessiné. L'échange, mot à prendre ici littéralement, n'a quasi pas été modifié, juste quelques petites corrections et précisions. Le ton, le style, le rythme, même la ponctuation dans une large mesure ont été conservés car ils reflètent bien à quel point cette conversation était vivante, et donc sans doute caricaturale, un peu à côté de la plaque peut-être. Mais c'est ce qu'il pouvait advenir de mieux à Plastico: faire naître un tel échange.

     

    ANNE: Bon, par quoi souhaites-tu que l'on commence...?

  • YVES: Le désagréable.
    ANNE: Oki! Il y a trop de "films" dans ton film... Et pas assez de carrefours. Ou du moins, les carrefours ne sont pas assez clairement indiqués. Autrement dit l'ensemble laisse un goùut étrange
  • YVES: Je comprends, je crois

  • ANNE: "fragments de", disjoints, hybride, c'est le mot qui me vient...
  • YVES: C'est délibéré
  • ANNE: Je pars du principe que tout l'est.
  • YVES: Oui
  • ANNE: Il faut absolument partir de cette idée. Soit. A la réception, cela ne passe pas, donc question: est-ce le public? (le public, ce soir, c'est moi)
  • YVES: Tu veux déjà une réponse?
  • ANNE: Oui, bien sûr, on n'est pas au tribunal! Cela se passe toujours entre les deux... Le public de ce soir n'est pas un bon public Je veux dire que je ne suis pas coutumière du cinéma d'art et d'essai. Mais justement, parlons-en...
  • YVES: Je pense que, tout sujet bien constitué vise à l'unité et recherche l'unité. Et donc, le public, devant une oeuvre d'art, cherche son image cohérente comme dans un miroir. Hors, dans ce projet, j'ai voulu attaquer ce besoin occidental de thèse + antithèse = synthèse, etc..., ce besoin de miroir, ce narcissisme. J'ai voulu faire un miroir brisé car c'est le narcissisme occidental qui est à l'origine de l'exploitation intensive de la terre. Les gens qui ont des identités parfaites et croient savoir qui ils sont me font peur. Ils sont capables de tuer pour défendre cette illusion. Je préfère briser les miroirs.
  • ANNE: Mission accomplie, en ce sens. Dans le sens de la déconstruction, mais...
  • YVES: Je souhaite soulever des questions, pas donner des réponses. Il y a un lien entre la peinture illusioniste, par exemple, et le début de l'agriculture intensive.
  • ANNE: Oui, je comprends et je pense l'avoir senti car il y a une volonté perceptible dans tout cela.
  • YVES: Peindre des paysages, est-ce exploiter la terre?
  • ANNE: A plusieurs reprises et c'est critique à un moment: tu fais du cinéma.
  • YVES: ?
  • ANNE: Pourquoi, pourquoi, pourquoi la caméra reste-t-elle fixe??? Dure, tenace, c'est presqu'injurieux pour le spectateur "moderne"...! Je le dis mal, car je n'ai pas pris le temps de murir mes mots. Accompagner le mouvement, mais le choisir...un truc du genre...rien n'est si statique au monde, c'est une violence comme un regard qui ne clignerait pas, cela fait mal aux yeux...t'es-tu demandé si tu avais le droit...? le droit d'imposer une telle chose au spectateur, sans l'avoir préalablement "averti"?
  • YVES: Oui, je veux insulter ses habitudes qui le confortent dans son moi de spectateur auto-satisfait. Et si la caméra est fixe, c'est parce qu'elle est descendante de la peinture illusioniste. Du cadre fixe.
  • ANNE: Mais je reçois le sentiments de quelque chose qui m'est imposé sans joie.
  • YVES: Parce qu'une caméra qui bouge tout le temps, c'est du spectacle pour faire oublier son regard. Qu'est-ce que le regard?
  • ANNE: La caméra est l'instrument d'une joie dont tu sembles te priver et nous priver parfois -> encore une fois, cela ne concerne que moi, dans le feu de l'action.
  • YVES: Pourquoi ça doit être une joie si regarder (comme peindre) c'est exploiter? Et la joie de filmer un désastre et de peut-être y prendre part?
  • ANNE: Non, Yves, oui sur le fond, oui à titre exemplatif mais pas sur le mode de l'acharnement. Tout est question de durée... Observe combien de temps on peut cesser de respirer. Il n'en faut pas beaucoup pour survivre, or, tu te dois de maintenir le spectateur vivant, jusqu'au bout. Je vais devoir y aller, je dois travailler une heure et puis je reviens, mais je voudrais encore te dire une chose: ton film fait mouche parce que je sui révoltée. On ne peut pas rester indifférent.
  • YVES: Je ne suis pas catholique, mais protestant iconoclaste, en caricaturant. Surtout à notre époque. Parce que l'image est une des plus grandes puissances d'aliénation de notre époque, elle fige, elle est du côté du pouvoir. Ce n'est pas pour rien qu'un des premiers appareils photographiques avait tout d'un fusil.
  • ANNE: Parce que ce que tu filmais était beau, souvent...
  • YVES: Oui, je voulais aller jusqu'au bout de la beauté et dire: mais qu'est-ce que cette beauté?
  • ANNE: Oui, je comprends, je comprends vraiment. Mais qu'est-ce que tu comptes mettre à la place?
  • YVES: Rien. Ce sont les questions qui m'intéressent. La réponse sera toujours une illusion, si pas une erreur criminelle. Les belles images, est-ce une mise au tombeau? Seule salvation, le chant?
  • ANNE: Oki. Là je te rejoins. Mais quelle est la question?
    YVES: Pourquoi a-t-il fallu à tout prix coloniser cette terre libre et austère de Nijar? Pourquoi faut-il que ce paysage soit mis sous plastique? Pourquoi ce besoin de "développement"? Pourquoi toujours ce désir de cadrage, de contrôle et d'usage des choses? Zut, la question suivante que j'allais écrire vient juste de m'échapper... Il n'y a qu'un plan à l'épaule dans le film: c'est celui où j'essaie de m'associer au mouvement libre des chèvres. Moment utopique.
    ANNE: Ce passage avec les chèvres est fantastique. Comme l'est la descente dans le village désert et le moment où l'on traverse ces "champs de hangars en plastique (ces passages m'ont fait penser à Koyaanisqatsi). Et j'aime beaucoup aussi ces images mêlées, oui beaucoup. Mais pourquoi tu n'as pas fait un film poétique?
    YVES: C'est à dire?? Je pense que la réponse à ta question, c'est que je voulais "disposer" les éléments du film quasi théoriquement, plutôt que les pratiquer dans un film poétique. Mais je ne suis pas du tout sûr d'avoir compris ce que tu veux dire par là.
    ANNE: Mais ce que je comprends surtout, c'est que tu as posé des bases sur lesquelles tu peux maintenant construire... Parce que ce film, pour moi, c'est le terrain, le terrain sur lequel tu vas bâtir... je ne sais pas comment l'exprimer
  • YVES: Non, je l'ai dit il y a quelques jours dans mes posts sur Facebook: l'histoire de la fille quasi autiste qui est venue me voir et s'est éclatée par le chant, pas par l'image. L'image, le regard sont mortifères et prise de pouvoir. Le chant porte la vie du corps et est don.
  • ANNE: Hm...Associer le regard et le pouvoir ne me paraît pas fondé... je regarderai, mais je parie tout ce que tu veux... Je continue... Ce doit être très dur et je te fais mes excuses pour cela
  • YVES: Non, je me dis que mon film est peut-être sacrilège violent. Presque scandaleux, d'où ta réaction.
  • ANNE: Il le serait si tu avais atteint ton but et je crois que tu l'as manqué ; de peu, sans doute, mais manqué... Peut-être ces carrefours où tout s'éclaire... il ne faut pas oublier que c'est très peu de choses, très peu de choses...
    YVES: Pour toi peut-être, pas pour d'autres.
  • ANNE: Oui, pour moi, bien sûr, mais je voudrais y venir. Il y a en art au moins deux types : Dans l'un, tu t'adresses au commun : autrement dit, au plus de monde possible; dans l'autre, tu t'adresses à tes pairs: les avertis, ceux qui connaissent et manient les codes, des codes bien précis. Moi, j'appartiens au premier groupe: je ne sais rien de rien, je débarque
    YVES: Je pense que tu ne débarques pas alors que tu as passé des années à regarder, à voir, à croire en ton regard. Une amie américaine qui n'est pas du tout dans le cinéma a dit que c'était très beau parce que la musique nous sauvait des images. Quelque chose comme ça.
  • ANNE: Et je vois plusieurs films se dérouler simultanément sous mes yeux, je vois aussi plusieurs genres: il y a un concert filmé, il y a ces promenades, il y a ces panoramiques et puis ce documentaire sur ces gens qui font de la céramiques, et entre les gouttes et comme pour "lier" tout cela, des images, des images anciennes et moins anciennes...
  • Oki, parlons beautés, maintenant, parce que ma fille me presse : Putain de texte! Fallait pas le chanter! Ou alors fallait pas le chanter et le filmer! Ou je ne sais pas quoi, mais le texte, le texte tout nu, il déchire! Putain de musiciens aussi
  • YVES: Il fallait éventuellement le chanter sur écran noir.
  • ANNE: Oui, peut-être, et le parler, le parler, le dire à voix simple.
  • YVES: Ici, le meilleur choix était de le chanter pour donner de l'espoir, mais nu et in situ comme chez Straub et Huillet, surtout pas off.
  • ANNE: Et cela d'autant plus que cette chanteuse est terrible et son musicien aussi, donc, merde et merde et merde!!!
  • YVES: (J'aimerais vraiment publier cette discussion.)
  • ANNE: Oui, elle...elle est merveilleuse!
  • YVES: oui!
  • ANNE: Juste, droite, elle y va sans dévier.
  • YVES: Comme personnes, ils sont merveilleux aussi. Demande à Ricardo.
  • ANNE: Et lui avec, sans peur et sans reproches. A ce propos, Ricardo 10/10. Son impeccable.
  • YVES: tu lui diras?
  • ANNE: Mais les images aussi quand tu te bouges un peu, crotte!! Fallait pas en faire des masses, mais rester tout raide face à ces deux-là, comment dire, ça m'a fait mal!!!

    YVES: Respect pour la musique, ne pas faire le malin pendant qu'ils font de la musique, ne pas parasiter par les yeux la perception auditive.

    Bref. Autre chose, de TRES important et c'est ici le poète qui parle. La poésie ( quand elle est bonne) est un concentré. C'est fort, c'est aigu, c'est puissant. Bref, on ne lit pas (ou rarement) un recueil de bons textes en une fois sans friser l'indigestion. Or, au cinéma, tout t'est imposé. Pas question de fermer le livre, pas question de respirer. Et le texte est si fort, les interprètes si remarquables et leurs apparitions si nombreuses que malgré tout l'air que tu as mis entre les extraits, je n'y suis pas arrivée...je ne sais pas si je me fais bien comprendre...

  • YVES: Tu ne dois pas y arriver, juste te "baigner" dans ce texte et tant pis si tu ne captes pas tout tout de suite, juste regarder plusieurs fois au lieu de consommer en une. DVD et VOD, le futur des films.
  • ANNE: Il est très important que tu entendes ce qui sort de la première, mais oui, je te donne raison et d'ailleurs, j'allais le dire. Car ce film, en effet, se manifeste comme quelque chose qui demande à être revu.
  • ANNE: ...Tu tiens le coup..?
  • YVES: Sans problèmes!
  • ANNE: ...
  • YVES: ...?
    ANNE: Then, ton film comme hésite entre la volonté de dire et celle d'exprimer, celle d'expliquer ou de non expliciter et celle d'imposer, il se ballade sur la frontière.
    YVES: C'est un film pervers. :-)
    ANNE: Et c'est toujours gênant, les frontières parce qu'elles sont indéfinissables, et que... et que...
    YVES: J'aime l'ambiguïté. Je n'aime pas notre thèse-antithèse-synthèse. Je reste sur la frontière entre thèse et antithèse. Des fragments.

    ANNE: C'est un peu comme si je te disais que sur le fond, le premier venu est susceptible d'en venir assez rapidement au fait, mais que pour s'octroyer le droit d'être entendu, il s'agissait de se battre. L'audience est à ce prix. Et je ne prononce pas ces mots sans les avoir réfléchis : cotoyer les frontières est un "droit" qui "s'acquiert". Le plus commun consiste en une somme de travail, voire des souffrances avérées, je ne sais pas... Ce que je veux dire c'est qu'il ne suffit pas d'avoir "bon", ou d'avoir "raison".

    YVES: Heu...

    ANNE: Il faut faire le nécessaire pour être entendu.

    YVES: J'ai travaillé quasi seul pendant au moins 4 ans pour ce film et souvent contre les autres. Mais le public peut travailler un peu aussi pour entendre. Les langues, ça s'apprend. Et d'abord, peut-être travailler sur lui-même plutôt que consommer passivement.

  • ANNE: C'est un honneur pour moi, tu sais d'avoir pu le voir, même dans ces conditions (streaming). Autre chose : sur grand écran, ça doit être tout autre chose... Voilà, Yves... Je suis allée très vite et sans pincettes...
  • YVES: Un honneur? ce n'était pas l'intention. Ou alors, dans un autre sens, peut-être... Merci! Je peux publier ce dialogue sur le blog du film?
  • ANNE: Si j'avais eu plus de temps, j'aurais fait les choses mieux, mais j'aurais alors perdu la flamme, la flamme de l'immédiat, c'est la plus précieuse.
  • YVES: Pour moi, c'était passionnant et je me sens plus fort, est-ce grave, docteur?
  • ANNE: Mais...je...
  • YVES: Parce que c'est justement des dialogues comme ça que j'espérais engendrer. Mais en le refusant dans les festivals belges, on impose le silence.
  • ANNE: Je n'ai aucune légitimité à critiquer un film.
  • YVES: Bon, on va manger, non?
  • ANNE: Oui, mais j'aurais parlé plus... arf... soit... tu as raison... oui, y fait faim
  • YVES: De toute façon, tu ne peux pas savoir à quel point je suis heureux de cette conversation. Parce que ça veut dire que le film mérite qu'on s'y arrête. Dernier mot orgueilleux de mon côté: j'ai le sentiment d'avoir fait un film inacceptable, peut-être scandaleux, pour toute personne bien constituée, à la fois séducteur et pervers puisqu'il s'échappe.
  • ANNE: Tu as fait un film impropre à la consommation, Yves... Mais continue, continue, continue, continue. Si tu as quelque chose à dire, tu n'as de toute façon pas le choix
  • .
    Merci beaucoup, Anne.
    .
    La première de "Plastico" aura probablement lieu en décembre à Bruxelles.
17 juillet 2013

Les dernières touches...

Fin juin, cinq jours de mixage avec Loïc Villiot au CVB - Centre Video de Bruxelles, cinq jours pour doser les sons: en particulier, définir le rapport entre bruits et musique, leurs interactions, leur conflits éventuels. (Il y aura beaucoup de vent [... parce qu'il y avait beaucoup de vent!]) Maintenant, la musique est vraiment ancrée dans le lieu et le moment. "Les dernières touches" puisqu'il a été question de doigté: nous avons aussi joué avec l'air, les silences, dont chacun a sa propre couleur ou trouve sa propre métaphore ("Ici, il faut que la séquence puisse se prêter au sentiment du silence de Dieu"). Avec les "descentes" du bruit au silence; parfois même jusqu'au "muet", jusque dans de véritables "trous", absences totales de sons qui renforcent le regard et la conscience du regard, et qui donnent au film et à sa bande sonore une dimension quasi sculpturale.

 

On approche de la fin. Mi-août: cinq jours d'étalonnage avec Miléna Trivier au CPC - Création, Production & Compagnie. Harmonisation et cohérence des couleurs et des lumières à l'intérieur des séquences. Certains plans appartenant à une même séquence sont plus "froids" ou plus "chauds" que d'autres: il faut corriger ça en fonction des intentions ponctuelles. Parfois, on recherchera quelque chose de plus froid (rarement, a priori); parfois de plus chaud, cela intuitivement. "Dernières touches" picturales, cette fois.

 

Et voilà, le film sera alors terminé. Mais déjà, la société de production Hélicotronc se charge d'inscrire le film dans des festivals, même avec des dvds du film pas tout à fait terminé (merci à David, Ethel et Felipe!). Les sélectionneurs ont l'habitude.

Merci d'avance à tous ceux qui y ont collaboré! Ils se retrouveront au générique! Eh oui, il faudra assumer... ;-)

Merci au CVB, à la Scam et aux deux co-producteurs: Hélicotronc et Anthony Rey, et le CPC!

Les réactions positives de ceux qui ont pu voir le film indiquent qu'il y aura un public: pas le "grand public" (dont on ne sait pas très bien ce qu'il est...), mais un public qui mérite de voir autre chose sur les écrans, qui mérite lui aussi aussi de voir ce qu'il aime.

Pour moi, il s'est passé quelque chose de majeur: la prise de liberté, sans tenir compte des pressions économiques et idéologiques. Maintenant, que le public jouisse de cette liberté, de la possibilité de cette liberté.

Je pense déjà à une première. Septembre? Octobre? Idéalement, une première dans une belle salle, et une projection précédée d'un petit concert de Veronika et Albert... Qui connaît une bonne salle à un prix abordable pour un film auto-produit?

A bientôt et bon été!

19 juin 2013

Aide de la SCAM: merci!

Je suis très heureux de vous annoncer que la Scam, Société civile des Auteurs multimédia, a décidé d'attribuer à "Plastico" une bourse d'aide à la finition. La somme n'est pas énorme par rapport au budget total, mais ça fait plaisir et semble surtout indiquer que la Scam estime que le projet en vaut la peine! :-) Merci beaucoup!

29 mai 2013

Le montage son

Après ces questions abstraites (pertinentes ou non), j'en reviens au concret, au travail devant l'ordinateur, l'écran et les hauts-parleurs. Et là, les choses se font plutôt intuitivement...

Déjà environ trois semaines de montage son, avec Loïc Villiot. Et une petite escapade à Budapest où Veronika et son Jazz Quartett, featuring Albert, présentaient, parmi d'autres, quelques chansons du film en concert au Budapest Jazz Club.

 

budapest-jazz-club-hollán-ernő

 

Retour au concret pour ce message, donc. Enfin, apparemment...

Pour ceux qui ne connaissent pas les arcanes de la fabrication d'un film, quelques mots sur cette étape de finalisation. Mais aussi de création. Dans le cas de "Plastico", les images du film ont été filmées avec une caméra vidéo munie d'un petit micro incorporé, classique. Les sons en étaient donc assez peu contrôlables, lorsqu'il y avait des coups de vent, par exemple. Jusqu'à présent, les diverses versions du film (sans les parties chantées) ont été montées avec ces sons de caméra. Je m'y suis habitué. Loïc, lui, les reçoit d'une oreille vierge. Nos perceptions sont donc différentes. Il me réveille.

Un exemple très simple: bizarrement, un plan filmé dans un endroit précis n'est pas accompagné du même bruit de fond industriel (intéressant) que d'autres filmés quasi au même endroit. Afin de rendre au lieu son unité, il nous faut trouver le moyen d'ajouter ce son industriel au plan qui en est privé.

Pour le dernier tournage, celui des parties musicales, Ricardo Castro s'est chargé d'enregister les sons avec du vrai matériel pro, en même temps (il y avait deux prises de son, donc): il s'agit de prises très pures, très claires. Presque du studio. Autre chose que mes sons.

Je ne me lasse pas d'écouter et réécouter les compositions d'Albert et de Veronika telles que les a enregistrées Ricardo: c'est l'inverse de la séduction immédiate et de l'oubli, de ces disques qu'on écoute tous les jours pendant une semaine et puis qu'on oublie. Plus je les écoute "en soi", plus je suis impressionné.

003

Mais avec le montage son, il se passe encore autre chose. En reconstruisant l'espace sonore autour de ces prises propres, autour d'Albert et de Veronika (en ajoutant un vent qui correspond aux mouvements visibles des branches d'un arbre, par exemple), la chanteuse et le musicien sont soudain revenus dans le monde. Ils chantent dans le monde, malgré le soleil et le vent. Ils sont des êtres humains dans le monde. Ce n'est pas du studio. Ce n'est pas du réalisme, c'est de la vérité, malgré la reconstruction sonore. Et c'est fondamental pour le sens du film.

Plus généralement, il s'agit donc à présent de remplacer les sons "moyens" de ma caméra avec les prises, nettement meilleures, de Ricardo. Mais, en ce qui concerne les sons "moyens" des tournages "documentaires" réalisés les années précédentes, il faut aussi essayer de les remplacer (à nouveau, lorsque trop de vent, par exemple) ou enrichir. Se pose déjà là une question esthétique: s'agit-il de reconstruire un environnement le plus "réaliste documentaire" possible, ou faut-il plutôt créer une sorte de "composition" en épurant certains moments et en enrichissant d'autres? Quel effet cela a-t-il sur la perception par le spectateur et, donc, quel sens?

Ainsi, dans le cas de la séquence d'ouverture, le travail de montage est particulièrement intéressant: les images de l'aube y évoquent une sorte de naissance du monde, de genèse, auquel fait également allusion le premier fragment poétique. Mais il s'agit aussi à présent d'une "naissance du bruit" composée de telle façon que ce motif de la genèse soit également suggéré de façon sonore: du silence à l'agitation. Le spectateur n'en sera peut-être pas immédiatement conscient, mais cette construction est là.

Autre exemple concret: la séquence de la grande ferme abandonnée. Nous nous sommes rendu compte qu'en cherchant à étoffer les sons pauvres de ma caméra, nous rendions aux espaces filmés leur réalité, comme si nous étions là, les deux pieds sur le sol, en train de visiter un lieu, un peu comme des touristes ou des reporters. Hors, cet édifice abandonné doit plutôt nous ouvrir la porte d'un autre monde, un espace mental, où surgiront les fantômes des images d'archives. C'est donc en grande partie à un appauvrissement sonore que nous avons travaillé.

 

Luz1

 

Luz2

 

 

 

 

 

 

Autres tonalités de couleurs, autres lumières, donc autres textures sonores? Loïc associe parfois un certain type de son à certaines couleurs, selon qu'elles sont chaudes ou froides.

 

En outre, plus largement, quelle place peut-on accorder aux sons, au montage de sons (ou aux compositions), alors qu'il existe déjà une autre texture sonore, celle des chants de Veronika et Albert? Faut-il aboutir à une sorte de flux sonore ininterrompu, réaliste, qui risque de tout neutraliser, ou simplifier, ou complexifier?

Enfin, le montage cinématographique classique tend à rendre le film le plus lisse possible en unifiant les espaces (quand on filme une pièce sous plusieurs angles, par exemple, on doit pouvoir en dessiner un plan cohérent), ce tant par le matériau visuel que sonore. Ici, les sons peuvent au contraire souligner plus ou moins les ruptures dans l'espace, le montage de fragments, et mettre l'espace visuel classique un peu en crise (cf. mes "Questions" dans le message précédent). Mais ce sont des choses qui se décident pragmatiquement.

Encore une semaine de montage son en juin, et puis trois jours de mixage en studio...

 

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Plastico: un documentaire et un film musical.
  • Se couvrant de serres de plastique, cette région d'Andalousie oublie son passé, et est la proie d'un désastre écologique et d'une crise culturelle: tout devient surface. Mais il s'agit peut-être d'une crise européenne.
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